Feux de forêts

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Rencontres insolites : au-dessus de nos têtes

Avant-Propos

Nombreuses sont les rencontres lors de nos balades; vestiges et témoins d'un passé encore récent, les traces de charbonnières, fours à chaux, à cades, aiguiers, bories, moulins, etc., se succèdent.

Randonneurs, nous les cotoyons régulièrement, en connaissons (plus ou moins) leur usage, leur activité, les métiers y découlant. Je dis bien plus ou moins car hélas, le temps qui passe efface bien des souvenirs.

J'ai pensé qu'il ne serait pas vain de réveiller, de rappeler ce qu'étaient ces ouvrages, d'éclairer les visiteurs de notre si belle Provence.

Mais si nous randonnons sur terre, certaines rencontres se font dans les airs, au-dessus de nos têtes : je veux dire moyens de lutte contre les feux des forêts que nous parcourons, d'où la création de cette nouvelle rubrique dont voici le huitième volet dédié aux Canadairs, Trackers et autres Dahs8..

Historique : Il y a une quarantaine d'années, les seuls moyens de lutte contre le feu étaient les troupes au sol.

Puis vint la création de la base de Marignane le 24 juin 1963.
Le ministère de l'intérieur fait l'acquisition de deux Catalina. En 1969 ils seront sept et en 1970, les Catalina sont remplacés par des Canadair CL215, déjà utilisés au Canada.

D'autres appareils sont ensuite arrivés à la base de Marignane : des DC6, Tracker, Fokker, Dash8 et en location des Hercules C130.
La base de Marignane est le berceau des moyens aériens de la sécurité civile pour la lutte contre les feux de forêts.
Cette mission est permanente toute l'année, du lever au coucher du soleil.
Pendant les periodes à risques tout le sud de la France est surveillé par des moyens aériens.

Attention déluge!

Tracker au remplissage

Une réponse à des besoins quotidients: - cette surveillance est assurée par les Tracker et les Dash8 qui survolent inlassablement les zones sensibles et sont prêts à attaquer les feux naissants.
Il faut savoir intervenir dans les dix minutes si on ne veut pas qu'un feu devienne incontrôlable. Imaginez le stress des pilotes en charge de ces missions !

Une technique bien rôdée : - les Tracker et les Dash8 emportent un produit coloré nommé retardant qui va freiner la propagation du feu en attendant les secours.
Deux Tracker sont nécessaires pour être efficaces et emportent chacun 3.300 litres de produit. Le Dash8 opère seul et peut larguer 10.000 litres !

Pour s'approvisionner les Dash8 et les Tracker doivent se poser sur des terrains équipés de stations de remplissage. Le plein de leur soute se fait en quelques minutes.

Canadair en action d'écopage

Canadair en plein largage!

Mais le feu échappe : - il arrive que le feu échappe malgré la vigilance et la rapidité d'intervention ; il faut alors faire appel aux Canadair. Ceux-ci travaillent essentiellement à l'eau et souvent par groupe de quatre ou plus. L'efficacité réside dans la masse d'eau larguée, le nombre d'avions et surtout la fréquence des rotations, un seul Canadair emportant 6.000 litres d'eau à lui seul.

Contrairement aux Dash8 ou Tracker, les Canadair n'ont pas besoin de se poser car ils écopent sur un plan d'eau, mer, lac ou fleuve. Cet écopage se fait en douze secondes, mais la difficulté pour les pilotes réside dans un compromis, quelle que soit la météo. Compromis entre le vent, la houle, le clapot, les baigneurs et les embarcations.
Il faut autant que possible écoper face au vent et parallèle à la houle. Pas trop loin du rivage car sinon les creux sont trop importants et tenir compte du relief qui souvent peut gêner la sortie de l'écopage.

Autres difficultés : les corps immergés (par exemple troncs d'arbres etc.) dérivant sur les fleuves ou les lacs. Mieux vaut ne pas les rencontrer!
Enfin, un autre souci : les embarcations et les jet skis, en recherche de sensations, qui viennent souvent à la rencontre des Canadair.

Quant au largage, là encore il y a des compromis à faire. Si au sol, l'on demande des avions c'est parce que le feu progresse vite et qu'il y a à priori du vent, donc des turbulences. Celles-ci peuvent être légères ou très fortes et vont influer sur les caps d'attaque, les hauteurs de largage et la réussite de la mission car en cas de turbulences trop fortes, il peut arriver que les bombardiers quittent le ou les feux.

Précautions et sécurité envers le terrain : les hauteurs de largage sont de 30 mètres environ. Et en fonction du vent, de cette hauteur ou de la vitesse, on peut, au sol, recevoir soit de la pluie, soit une grosse massue qui vous projettera plus loin, pouvant vous blesser gravement. Si le largage est vraiment trop bas, il y aura projection de cailloux, rochers branches et même du feu.

Le souci des pilotes est d'éviter de larguer à proximité des troupes. Les pilotes sont donc toujours en contact avec le chef des secours au sol, afin de coordonner les moyens et d'autoriser ou pas les largages.
Dans des zones avec des habitations l'on larguera plus haut, bien sûr. Et si par hasard on découvre quelqu'un en difficulté, personne isolée ou pompier, on fera un largage à 100 m de hauteur afin de calmer la progressien du feu, sans blesser la personne.

A ces difficultés se rajoutent aussi les obstacles, naturels ou artificiels. Tout bon pilote de bombardier d'eau fera d'abord un large tour du feu afin de connaître les difficultés et il prendra soin de bien identifier la "sortie" de sa passe après largage afin de ne pas se trouver face à une mauvaise surprise comme par exemple un poteau où une ligne électrique.

Pour le promeneur qui un jour rencontre le feu, il doit surtout s'éloigner perpendiculairement de l'axe de propagation du feu qui est matérialisé par la fumée. Grâce à la fumée, l'on sait d'où vient le feu et où il va. A savoir aussi qu'en terrain plat le feu s'ouvre d'un angle de 30° pendant qu'il avance.
Lors de grands feux, il peut arriver de voir un vrai ballet de tous les types d'avions.

Quelques détails techniques sur les appareils :
Caractéristiques	CL415 CANADAIR :	TRACKER :	DASH8 :
Moteurs :	2 x 2380 cv	2 x 1425 cv	2 x 5000 cv
Vitesse :	350 km/h	420 km/h	640 km/h
Autonomie :	4h00	3h30	4h00
Capacité en litres :	6.000	3.300	10.000
Pilotes :	2 pers.	1 pers.	2 pers.

Un lourd tribu : - si la technique et la réponse aux besoins de lutte existe bien, néanmoins un lourd tribu est versé dans cette lutte quasi inégale.
Chaque année amène son lot de blessés, ses morts en service commandé. Les manoeuvres, les exercices de formation ou de perfectionnement des pilotes ne font que renforcer ce lot.

Amis randonneurs et tous ceux fréquentant les forêts n'oubliez pas les précautions élémentaires : ne pas fumer, ne pas faire de feu si minime soit-il. . Ne contribuez pas à la destruction de foyers (familiaux cette-fois ci), ne faites pas de veuves et d'orphelins, bref, soyez responsables de vos actes ! Je vous en remercie pour eux et espère de tout coeur que cette rubrique saura éclairer et faire comprendre ce qui se passe au-dessus de nos têtes.